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Le Key-Déli-Ô-Scope [Français]


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Key-Déli-Ô-Scope]


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Le Key-Déli-Ô-Scope]


Ecrit en 2015


– Les lasers. Les lasers ! Eblouissants ! Partout. D’un bleu électrique, d’une profondeur… Ah ! Ces lasers ! Je n’avais jamais rien vu de pareil. C’était si beau… Abasourdi, j’étais… abasourdi. Difficile à distinguer ce qu’il se passait dans la pièce. Et il y avait cette rumeur, ces murmures, les cliquetis. Clâc ! Clâc ! Clâc ! Clâc… A n’en plus finir. Des bruissements de vêtements. Des silhouettes, dessinées par intermittence, au travers du bleu des lasers. Affairées. A quoi, je n’en savais rien. Cyriaque ne me laissa pas le temps de m’appesantir sur la place. « Viens ! Et vite ! Passe la porte, Cid va arriver ». Il ajouta : « T’as pas intérêt à faire le malin. De toute façon, maintenant qu’on est au courant que t’as essayé de nous infiltrer, on t’a à l’oeil ». J’entrai dans la pièce, carrée, avec rien d’autre que le tissu diaphane et virevoltant des lasers bleus. Au dehors, un cri. Incompréhensible. Encore cette langue étrange… Cyriaque pesta : « Divulgue de spion malafrasque ! Mauvais moment, t’arrivade au comble du comble. Fouxstase de bordel de merde ! ». Un homme arriva en trombe dans la pièce, à reculons. Derrière sa combinaison, l’inconnu cachait un sourire triste. Il ne se présenta pas, mais je sus instantanément que c’était l’homme avec lequel j’avais rendez-vous. « Salut Cid », lâchai-je laconiquement. Il se retourna, s’adressa à Cyriaque : « Vaste, j’asque desormate notre hôste, in privatisme ». Puis marmonna : « Comment as-tu pu ? Je te faisais confiance, Aksel… ». J’allais répondre, quand il me coupa : « Non, ne dis rien. Je dois savoir. Vas-tu ? Vas-tu aider les saufsurvoyants ? Ou préfères-tu rester immergé dans ton simulacre de vie ? La réponse, nous la voulons. Maintenant ! ». Je restai silencieux. Je ne le savais pas moi-même. « Arche-Lorderie, il ne manquait plus que ça.  Ca veut dire non ? Qu’en est-il de… ? ». Un autre cri. Dans la pièce d’à-côté. Tressaillements de Cid. « On a pas le temps d’attendre sur ton bon vouloir. On a un problème. ». J’ouvris la bouche pour répondre, quand tout à coup, je vis l’un des lasers crépiter. Des petites particules translucides, comme un essaim de perles d’eau, s’en détachèrent. « Oh non… Oh non… Pas ça, pas maintenant. ». Vram ! J’eus en somme le temps de ne rien faire. Noir complet. Evanoui.

Lorsque je me réveillai, il n’y avait personne dans la pièce. Pas même les lasers. J’ouvris la porte, qui me mena à la grande pièce, là où j’avais vu ces lumières bleues pour la première fois. Vide. Elle était vide. A n’y rien comprendre… Où étaient-ils passés ? Que s’était-il passé pendant que je comatais ? Avaient-ils fui ? J’avais de fortes douleurs dans tout le corps. Il ne me restait plus qu’à rentrer chez moi. Dehors, la pluie était vorace. Elle mangeait les parcelles de mon corps, de son froid, de son liquide acéré. Je marchai… marchai. C’était une expérience si étrange, si nouvelle pour moi, de sentir sur ma peau les diluviennes. Grelottant, j’arrivai à mon appartement. Stop. Identification biométrique. Opérationnelle. J’entrai. Rien ne semblait y avoir changé, et pourtant je ressentais un profond malaise. D’un pas, j’entrai dans ma salle de bain, et de l’autre, atteignis ma pharmacie. Il me fallait une capsule. Tout de suite ! Laquelle choisir ? Un Paxificate, oui, un Paxificate. Ca fit bien l’affaire : le nœud qui grignotait mon estomac se détendit d’un coup, « et je ressentis la paix intérieure ». Je me rendis compte que je venais de parler comme l’une de ces fichues publicités que l’on doit impérativement choisir à chaque changement de zone sur l’Ô-Key. L’Ô-Key ! L’Ô-Key, avec ses couleurs fluorescentes, me semblait à présent bien fade. Qu’est-ce que j’allais devenir, si… ? Un Key-Secure-Ô-Log faussaire, un agent de surveillance renégat ? Ou resterais-je l’un de ces enfoirés qui passent leur temps à épier des gens, tout en récoltant des informations, rarement cruciales, souvent tragiques d’inutilité ? J’étais perdu. Ces saufsurvoyants, ils… Ils me retournaient la tête. Je les avais trahis, mais pas totalement. Il me restait une chance, une seule, de… Non. C’était trop risqué. Mon boss l’apprendrait. Je regardai mon attirail Key-Déli-Ô-Scopique. Mes ôSes, mes daily-S et mes lentilles keyscopiennes étaient bien en place, sur mon bureau. Me connecter. Il fallait vérifier. D’un geste, je plaçai les lentilles sur mes yeux, mis mes ôSes au-dessous de ma lèvre et dans l’oreille. Ces foutus piercings sonores, par lesquels on peut parler et entendre, sur l’interface virtuelle de l’Ô-Key… Je doutai subitement que ce fut une bonne idée. Néanmoins, je chaussai mes phalanges de ces petits dispositifs technologiques mous qu’étaient les daily-S, et me connectai au Key-Déli-Ô-Scope. D’un geste de la main, j’entrai dans ma chambre virtuelle, ma Déliroom. Les daily-S au bout de mes doigts, me permirent de saisir un bulletin de contacts, sur une étagère immatérielle. Le Psychoscope s’alluma instantanément : « Vous n’êtes pas dans votre état normal, Aksel. Prenez un autre Paxificate. Votre coeur a un rythme de… : ». Je n’écoutais déjà plus. Ce foutu Psychoscope, qui passait son temps à épier mes états psycho-affectifs. Et dire que son historique allait être consulté par mon boss… Je n’aurais jamais dû me connecter.

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