Drézil brandit ses Dés, sous les yeux estomaqués des deux gardiens.
– Des Dés ?
– Il a des Dés.
– Etranger, crache le dire-vrai. A quoi servent ces Dés ?
Le vieillard dit en riant :
– Ils ne servent qu’à une chose, à coup de trois fois la jetée : ils reformulent les Possibles.
– Ceci n’est aucunement dans l’ordre des choses.
– Non, ceci n’est même pas croyable.
– Comment les Possibles peuvent-ils reformulés ?
– Reviendra-t-on en arrière, si d’aventures, tu venais à les lancer ?
– Exactement. La scène qui se déroulait revient à l’instant T décidé.
– Peut-on revenir dans le Lointain Arrière ?
– Non, non, point. La plus haute marge de manœuvre comprend un couple de deux fois huit minutes.
– Ah ! C’est fort peu.
– Fort peu, heureusement.
– De tels Dés, si plus longuets, pourraient mettre en péril l’ordre des choses.
– Etranger, si tu en uses, tâche de bien faire.
– Oui, c’est ta responsabilité d’Objecteur.
– Je prendrai garde à son usage, attentionné à les faire jouer au moment le plus opportun.
– As-tu un autre Objet à faire montre à notre vue ?
– N’est-il pas dans vos lois de faire monstration de vos Avoirs en parallèle ? demande Drézil.
– Il connaît nos lois, le requinois.
– Oui, il connaît nos lois.
Les gardiens s’exécutent et montrent chacun deux Objets. A bien y voir, malgré les grilles des deux fenêtres, le vieillard perçoit un couteau, une écharpe, une pelotte de fil et un écrou.
– Veux-tu, étranger, que nous t’annonçons les propriétés de nos Objets ?
– Non, point, je vous fais confiance en votre nom, que d’ailleurs j’aimerai connaître.
– Nous sommes Hêhhalem et …Lûsk.
– …Lûsk et Hêhhalem, ainsi votre nom est. Drézil est le mien, je vous en fais la redite. Sachez que de lointaines plaines je viens, pour vous voir.
– Que veux-tu, Drézil l’Etranger ? Que viens-tu faire entre nos murs ? Quel est ton dessein, vieil homme fatigué ?
– Fatigué je suis, il est bien vu de votre œil de le dire en somme.
Le vieillard se tait. La Coiffe lui sussurre :
– Prends garde à tes paroles, car tu sais bien pourquoi.
Les gardiens, voyant la bouche du Chapeau se mouvoir, regardent Drézil non sans consternation, pour lui adresser une nouvelle fois la parole :
– Quel est ce Chapeau en bouche doté, qui de lèvres bougent et que tu portes sur ton fief cérébral ?
– Il s’agit d’une Coiffe d’Auto-Réflexivité.
– A quelles propriétés correspond cet Objet ?
– Cet Objet me permet de me parler, à même ma Personne, en mon Soi le plus profond. Comprenez-vous ?
– Non, nous sommes devant un Quoi. Que te dit ton Chapeau ?
– Ceci ne me regarde qu’en nombre seul. Je suis unique témoin de ma Coiffe, car de celle-ci sont réfractées mes pensées. Elles ne peuvent et ne doivent être entendues. Non que délibérément je cherche à les cacher, seulement que ces dernières sont miennes. Je porte une Coiffe non pas pour les diffuser, mais pour en vivre – par réflexivité – le sens profond.
– Coiffe philosophique, si j’entends bien.
– Coiffe étrange, s’il en est. Je n’aimerais aucunement réfracter mes pensées. Déjà qu’elles tournent depuis des lustres en modalité boucle, à force de veiller.
– A votre tour, Gardiens, de me faire monstration d’un de vos Objets.
Les deux gardiens se regardent en hochant de la tête, et montrent leurs casques.
– Voici nos casques. Leurs propriétés sont doubles, car les deux casques fonctionnent ensemble.
– La première propriété est de nous enchaîner au portail.
– Bien triste propriété, s’il en est, rétorque le vieillard.
– Non, car il en va de la sûreté des Peuples Civiliziaques.
– Notre mission est d’importance toute, car sans nous…
– Sans vous…?
– Sans nous, les Etrangers viendront piller l’Hexagonisme et répanderaient le chaos.